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Rosiers : raccourcir l'itinéraire de culture

Essais de production pleine terre de rosiers issus de bouture avec paillage de miscanthus sur le rang.PHOTO : CDHRC

Grâce à de nouvelles sélections, les rosiéristes se voient offrir la possibilité de s'affranchir du greffage et de proposer en moins de neuf mois des plantes en racines nues issues de bouture. Le CDHR Centre-Val de Loire (Astredhor Loire-Bretagne) étudie ce nouvel itinéraire.

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En soi, ce n'est pas une révolution. « Il existe déjà des rosiers paysagers (arbustifs et couvre-sol) issus de bouture et cultivés en conteneur », précise Sophie Bresch, responsable projets à la station CDHR (Comité de développement horticole de la région) Centre - Val de Loire. Pour les rosiers de jardin, il en va autrement, la majorité étant issus de greffage. Or un obtenteur propose désormais une gamme suffisamment large de cultivars susceptibles d'être multipliés par bouturage et capables de se développer en pleine terre sur leurs propres racines (ORF, Own Root Field), de quoi intéresser les rosiéristes. La station a donc entamé en 2016 une expérimentation destinée à comparer la production pleine terre de rosiers de greffe et celle de rosiers de bouture. Elle a présenté ses premiers résultats en septembre, lors de ses portes ouvertes à Saint-Cyr-en-Val (45).

1. UN CYCLE CLASSIQUE SUR DEUX ANS. Le cycle de multiplication traditionnel du rosier de jardin, par greffage, se déroule sur deux ans : préparation et plantation des porte-greffe en janvier-février de l'année N, greffage en été ; élimination de la partie aérienne du porte-greffe au printemps, pincements début d'été, arrachage à l'automne de l'année N+1 avec vente possible en racines nues ou conservation en chambre froide ; rempotage entre décembre de l'année N+1 et février de l'année N+2, forçage sous abri suivi d'une vente en mai des plantes en pot. Deux porte-greffe majeurs sont usuellement utilisés : Rosa multiflora et Rosa corymbifera 'Laxa'. Pour l'un comme pour l'autre, la reprise au greffage est parfois très faible.

Cette méthode de multiplication permet d'associer les qualités ornementales du greffon à la rusticité et l'adaptation au sol du porte-greffe. De nombreux cultivars ne sont pas aptes à se développer sur leurs propres racines, ne supportent pas le calcaire actif et, plantés directement en pleine terre, souffrent de chlorose ou bien dépérissent. La production de rosiers greffés est coûteuse en main-d'oeuvre, en intrants, et en temps, avec des pertes à la reprise qui varient aléatoirement à 10-15 % près, voire plus. L'itinéraire de culture oblige le producteur à anticiper ses ventes deux ans à l'avance.

2. DE NOUVELLES OBTENTIONS. « La multiplication par bouturage permet de gagner du temps », explique Sophie Bresch. « Mais tous les rosiers greffés actuellement ne sont pas aptes à être bouturés. Le comportement varie selon les cultivars : certains, issues de bouture, sont capables d'être vigoureux et de durer longtemps en pleine terre, c'est une sélection à faire. » L'obtenteur Poulsen développe ainsi depuis plus de six ans une gamme de rosiers de jardin ORF susceptibles d'être multipliés par bouturage. Les plants issus de bouture sont plantés en pleine terre, où ils se développent mieux qu'en pot, le printemps de l'année N. L'arrachage s'effectue l'automne de la même année. Les rosiers peuvent être vendus en racines nues ou rempotés en février N+1, forcés sous abri et vendus en mai en potée fleurie.

À partir de ces nouvelles obtentions, il est possible de réduire la durée du cycle de production en pleine terre et par conséquent la quantité d'intrants, le nombre d'interventions culturales... Le paillage sur le rang avec du miscanthus broyé doit permettre de limiter l'emploi des herbicides et les interventions manuelles.

« Le CDHRC évalue, dans un premier temps, la qualité de ces plants issus de bouture en racines nues, à l'issue de la phase de culture en pleine terre ; puis la qualité et la valorisation possible des potées fleuries obtenues après rempotage en conteneur et forçage sous abri pour une vente de printemps. Il vérifie la capacité des plantes à se développer dans n'importe quel sol, ainsi que le comportement de ces variétés sur leurs propres racines, le porte-greffe ne faisant plus tampon comme dans le cas d'un rosier greffé », explique Sophie Bresch.

3. QUALITÉ ET RÉACTIVITÉ. La station a testé cinq cultivars en 2016. D'après les résultats des essais, l'emploi de plants issus de bouture permet de réduire la durée du cycle de 18 mois à 6-8 mois. Tous cultivars confondus, les plants bouturés offrent un taux de reprise de 98 % contre 85 % pour les plants greffés. Présentés en racines nues, ils arborent plus de tiges que les plants greffés, avec un diamètre plus faible et un collet plus court. Cette architecture facilite l'opération de rempotage. Leur qualité est équivalente à celle des rosiers greffés. Ils offrent une proportion de premier choix de 85 %, contre 56 % pour les plants greffés.

« Le comportement en post-production doit encore être validé, pour vérifier l'influence du pH du sol sur les plants », précise Sophie Bresch. La station a entamé cette année des tests en conteneur de 5 litres remplis de substrat (Premier Tech Faliénor) sur une gamme de pH de 4,5 à 7. Dans les conditions de cet essai (substrat plutôt que sol, pour des raisons de praticité), les rosiers n'ont pas montré de symptômes dus au pH sur un cycle de culture de 10 mois : aucun écart n'est observé entre les plants issus de bouture et ceux issus de greffe tant en termes de coloration du feuillage, que du port ou de la vigueur.

Ce nouvel itinéraire permettrait une meilleure réactivité en réponse à l'évolution de la demande des consommateurs, avec un planning de mise en production plus précis. Les premiers résultats de la station confortent ceux obtenus par Jean-Marc Pilté, rosiériste à Quiers-sur-Bezonde (45). « Les rosiers bouturés offrent des lots homogènes dès la pleine terre, avec une qualité équivalente aux rosiers greffés », commente-t-il. Le producteur a décidé d'introduire cette nouvelle gamme dans son catalogue, sans toutefois se départir des variétés greffées (voir l'encadré ci-contre).

Valérie Vidril

(*) Voir le Lien horticole n° 1030, L'horticulture innove en station, p. 5.

Présentation des rosiers issus de bouture lors des portes ouvertes du CDHR Centre. La sélection de ces nouvelles variétés permet de produire des plants de qualité comparable aux plantes issues de greffage, sur une durée de culture divisée par deux.

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

Rosier issu de bouture. Le démarrage des tiges au collet permet un port plus intéressant.

PHOTO : AUDE RICHARD

Répartition des plants selon trois classes de qualité (classes 1 à 3 de gauche à droite) pour la variété Capricia™ Renaissance® et chacun des deux types de plant, greffés (les trois photos de gauche) et bouturés (les trois photos de droite).

PHOTOS : CDHRC

Greffé, le rosier 'Capricia' présente un collet plus haut que le rosier bouturé, moins de tiges et d'un diamètre plus important.

PHOTO : CDHRC (À G) ET AUDE RICHARD (À D)

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